Actualité

09. févr. 2022

Konrad Imbach : « Il y a une trentaine d’années, l’énergie produite par le bois ne couvrait qu’environ 3% du marché du chauffage, contre plus de 10% aujourd’hui. Nous avons donc fait de grands progrès. » Image : Energie-bois Suisse

A l’instar de la grande diversité d’usages pour la matière première qu’est le bois-énergie, une multitude de types de chaudières est disponible. Image : Energie-bois Suisse

Les gens qui restent davantage chez eux parce qu’ils doivent travailler à domicile veulent être installés avec un maximum de confort et profiter notamment d’un bon feu de bois. Image : Energie-bois Suisse

Konrad Imbach, président d’Energie-bois Suisse : « Je rêve d’une cohabitation harmonieuse de toutes ces possibilités d’application »

(Bois-énergie suisse) Le bois-énergie a gagné en actualité dans la discussion sur le réchauffement climatique, la pénurie d’électricité en hiver et la transition énergétique. Konrad Imbach, président de l’association Energie-bois Suisse, se dévoue sans relâche au développement de la deuxième plus importante ressource énergétique du pays. Dans cet entretien, il souligne le rôle important joué par le bois-énergie pour que la Suisse atteigne ses objectifs politiques en matière d’approvisionnement énergétique et de protection du climat.

Konrad Imbach assume la fonction d’une plaque tournante importante pour toute question liée à l’utilisation du bois-énergie. En période de pandémie, il privilégie lui aussi le travail à domicile. Dans ce contexte, il a constaté un intérêt croissant de la population vis-à-vis de la deuxième plus importante source d’énergie indigène. Avec Christoph Rutschmann, il fait le point sur la situation actuelle et les perspectives d’avenir du bois-énergie.

Des dizaines de milliers d’employés travaillent chez eux en ce moment. Cette tendance influe-t-elle sur le développement du bois-énergie ?
Les gens qui restent davantage chez eux parce qu’ils doivent travailler à domicile veulent être installés avec un maximum de confort et profiter notamment d’un bon feu de bois. Ceux qui ont le privilège de disposer d’un poêle d’habitat l’utilisent plus souvent. D’autres, nombreux, souhaitent rénover leurs anciennes installations. Ils décident par exemple de remplacer une cheminée ouverte inutilisée par un poêle à bois moderne ou par une cheminée à accumulation efficace, joignant ainsi l’utile à l’agréable. En outre, la hausse récente du prix du mazout et du gaz incite davantage de gens à plafonner à 18°C leur chauffage central et à mettre en service leur poêle ou cheminée pour atteindre les 21°C voulus. Comme un degré en moins dans la maison revient à réduire l’énergie de chauffage d’environ 6%, un bon poêle d’habitat permet d’économiser entre 15 et 20% d’énergies fossiles. Je chauffe mon domicile au bois depuis longtemps et ne souhaite rien d’autre.

Une exploitation accrue du bois-énergie est certainement dans l’intérêt de la politique énergétique. Les pouvoirs publics soutiennent-ils suffisamment ce développement ?
Ayant identifié l’importance du bois-énergie de bonne heure, l’Office fédéral de l’énergie OFEN a adopté des mesures d’encouragement variées durant plusieurs décennies déjà. Mentionnons à ce titre les projets de recherche et de développement, les installations pilotes et de démonstration, les projets destinés à améliorer la qualité des installations, les mesures de conseil et de communication, ainsi qu’un grand nombre de chauffages à plaquettes ou à pellets de grande taille, qu’ils soient intégrés dans un réseau de chaleur ou autonomes. L’Office fédéral de l’environnement OFEV a lui aussi pris conscience de l’importance du bois-énergie. Nous attirons régulièrement l’attention de l’OFEV – qui est responsable entre autres pour la propreté de l’air – sur les grandes avancées de notre secteur en matière de réduction des émissions.

Au cours de la dernière vingtaine d’années, l’utilisation du bois-énergie a triplé, alors que les émissions de fines ont diminué, passant de 7000 t à 2000 t actuellement. L’intérêt croissant des cantons est également réjouissant ; certains ont mis en place d’excellents instruments de soutien. A cela s’ajoute le programme d’encouragement de la fondation «Energiezukunft Schweiz EZS». Dans le but de réduire significativement les émissions carbone, des subventions sont allouées à un grand nombre de projets au bois-énergie moyennant des critères unitaires dans toute la Suisse. Je suis heureux de voir que l’engagement de toutes les parties prenantes réunies porte ses fruits. Il y a une trentaine d’années, l’énergie produite par le bois ne couvrait qu’environ 3% du marché du chauffage, contre plus de 10% aujourd’hui. Nous avons donc fait de grands progrès.

En signant l’Accord de Paris, la Suisse s’est engagée à atteindre un bilan climatique neutre d’ici 2050. Y parviendrons-nous ? Et quel rôle le bois-énergie aura-t-il à jouer ?
Personnellement, je considère cet objectif comme une boussole très importante. Le chemin pour y parvenir est long et exigeant. Toutes les énergies renouvelables doivent participer à un effort concerté pour nous permettre d’atteindre ce but. Si le bois-énergie joue un rôle important, son potentiel n’est pas illimité. D’après la statistique suisse de l’énergie du bois, le volume de transaction effectif pour le bois-énergie – y compris le bois des usines de valorisation thermique des déchets UVTD – a totalisé 4.95 millions de m3 en 2020. Cette quantité permet de remplacer environ 1 million de tonnes de mazout. C’est déjà énorme, mais ne correspond qu’à un pourcentage relativement faible de la consommation totale. Une analyse a révélé que nous disposons actuellement d’un potentiel de bois-énergie inutilisé qui se situe entre 2 et 3 millions de m3. En gros, nous pourrions accroître l’exploitation actuelle d’environ 50%, ce qui nous permettrait de couvrir presque 20% du marché du chauffage actuel. Pour atteindre nos objectifs climatiques, nous devrons donc recourir à toutes les autres énergies renouvelables. Plutôt que d’opposer les énergies renouvelables les unes aux autres, notre objectif commun doit consister à bannir les énergies fossiles du secteur du chauffage tout en continuant à réduire la consommation d’énergie de notre parc de bâtiments.

Comment se décline l’exploitation actuelle du bois-énergie?
Le bois laissé à l’état naturel constitue plus de la moitié des 4.95 millions de m3 exploités, soit 2.7 millions de m3. Un tiers de ce volume, soit 0.9 million de m3, est utilisé sous forme de bûches. Le bois naturel sous une autre forme qu’en morceaux, principalement des plaquettes forestières, correspond à environ 1.8 million de m3. De plus, 0.55 million de m3 environ sont utilisés pour produire des pellets. Les chutes de bois de l’ordre de 0.65 million de m3 par an servent à produire de l’énergie. Enfin, le bois usagé provenant de la démolition de bâtiments ou de produits bois en fin de leur cycle de vie, y compris le vieux bois employé dans les UVTD, correspond à un volume supplémentaire de 1.05 million de m3, ce qui n’est pas négligeable.

A l’instar de la grande diversité d’usages pour la matière première qu’est le bois-énergie, une multitude de types de chaudières est disponible. En effet, la statistique sur l’énergie du bois fait état de 20 (!) catégories d’installations différentes, de la cheminée à la centrale de couplage chaleur-force CCF ou à l’UVTD, en passant par les poêles d’habitat, les chaudières à bûches, ainsi que les chauffages à pellets ou à plaquettes.

Quelles sont selon vous les perspectives du bois-énergie dans l’espace de 10 ans?
J’espère voir tout le potentiel disponible exploité dans dix ans. A mon avis, c’est du gaspillage de dépenser des milliards pour importer des énergies fossiles de pays peu démocratiques tout en laissant inexploitées nos propres ressources énergétiques. Certaines améliorations techniques vont certainement progresser. Si nous instaurons des conditions cadres adéquates, j’imagine que nous pourrons recourir à la cogénération afin de renforcer la production d’électricité et d’énergie de processus à partir du bois. Des installations de ce type nous permettraient de tirer parti de la totalité de notre bois usagé plutôt que d’encourir des dépenses pour son exportation.

Je souhaiterais également que les approches prometteuses, dont la production de charbon végétal destiné à l’agriculture, gagnent en importance, car elles permettraient de mieux valoriser cette matière première précieuse qu’est le bois. On a déjà mis en service les premières installations de ce type. Il faudra trouver les bonnes solutions en conformité avec les conditions cadres pour que le bois-énergie puisse fournir – en plus de son produit principal qu’est la chaleur – de l’électricité, de la vapeur industrielle et du charbon végétal. Pour moi, la fascination du bois-énergie réside dans ses multiples possibilités d’usage. Il permet de chauffer une maison individuelle avec efficience, d’exploiter un réseau de chaleur climatiquement neutre, de produire de la vapeur de processus (par exemple pour le secteur alimentaire) ou de l’électricité, voire du charbon végétal (comme additif pour l’alimentation animale ou pour les processus industriels) à l’aide de turbines à vapeur ou de moteurs à gaz.

Je rêve d’une cohabitation harmonieuse de toutes ces possibilités d’application, en unisson avec la totalité des autres énergies renouvelables indigènes qui contribuent à protéger notre climat. Si notre pays prend clairement position pour les énergies renouvelables, nous pourrons parvenir à nous libérer des ressources fossiles. Cela ne se réalisera peut-être pas dans 10 ans, mais devrait être possible à l’horizon 2040. Je continuerai de m’y engager corps et âme.

Texte : Energie-bois Suisse

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